FEKIH-ROMDHANE F.1,2, SASSI H. 1, CHEOUR M.1,2
1 Tunis El Manar University, Faculty of Medicine of Tunis, Tunis, TUNISIE;
2 Hôpital Razi, La Manouba, TUNISIE
L’utilisation des réseaux sociaux a connu une croissance exponentielle au cours de la dernière décennie. Facebook est la plateforme de réseau social la plus populaire en Tunisie (plus de sept millions d'utilisateurs en début 2018), suivie par Instagram (plus d'un million d'utilisateurs). Plus des deux tiers (74%) des utilisateurs de Facebook et 80% des utilisateurs d’Instagram ont un âge compris entre 13 et 34 ans. Ces formes de communication omniprésentes chez les adolescents et les jeunes adultes sont particulièrement préoccupantes pour la santé mentale. Très peu de recherches se sont intéressées au lien entre l’utilisation problématique des réseaux sociaux et les troubles mentaux.
L’objectif de ce travail était d’étudier la relation entre l’addiction aux réseaux sociaux et les « Expériences Psychotiques-Like » (EPLs) dans un échantillon de jeunes tunisiens non cliniques.
Nous avons mené une étude transversale portant sur 1007 étudiants universitaires (age moyen = 22,0 ± 2,5, avec 64,6% de femmes). Les données ont été recueillies en utilisant un auto-questionnaire anonyme comportant les caractéristiques sociodémographiques et deux échelles de mesure (la “Positive Subscale of Community Assessment of Psychotic Experiences” et la “Social Media Addiction Scale”).
La majorité des étudiants utilisaient Facebook (94,3%) et/ou Instagram (65,0%), avec une durée moyenne d’utilisation de 8,5 années, et un temps moyen passé sur les réseaux sociaux de 4,8 heures par jour. Les « Idées de Persécution », la « Pensée Magique » et les « Expériences Bizarres » ont été signalés au moins « parfois » par 98,1%, 96,7% et 96,4% des étudiants, respectivement. Environ la moitié des étudiants (45.5%, n=459) ont déclaré avoir connu au moins une EPL positive « presque tout le temps ». Après contrôle des variables démographiques (sexe, âge) et des facteurs psychosociaux (consommation de tabac, d’alcool et de drogues), l’addiction aux réseaux sociaux a contribué de manière forte et significative aux EPLs (p <0,001).
À notre connaissance, il s'agit de la première étude évaluant la relation entre l’utilisation des réseaux sociaux et les EPLs dans une population de jeunes Arabo-musulmans. Nos résultats corroborent ceux des travaux antérieurs qui portaient principalement sur l'utilisation générale d'Internet, indiquant l’existence d’un lien significatif entre l'utilisation des réseaux sociaux en particulier, et les EPLs. L'utilisation des réseaux sociaux pourrait constituer une cible importante d’intervention précoce en psychose.
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