L'intelligence artificielle ouvre de nouvelles voies pour une psychiatrie de précision. Grâce à leur capacité à identifier des schémas complexes, les algorithmes de l’IA peuvent analyser des données variées, incluant des informations cliniques, neuro-imagerie, génomiques et électrophysiologiques.(1)
À ce jour, plus de 1400 études ont exploité le machine learning en psychiatrie. Ces travaux de recherche se concentrent principalement sur la schizophrénie (20,9%), la dépression (15,6%) et les addictions (11,0%). Bien que certaines de ces études affichent des performances diagnostiques impressionnantes, atteignant 90 à 95% de réussite, l'intégration de ces outils dans la pratique clinique quotidienne reste limitée car il convient de valider les modèles statistiques et de former les psychiatres(2).
Le Machine Learning est une branche de l'intelligence artificielle qui permet aux ordinateurs d'apprendre à partir de données, sans être explicitement programmés pour chaque tâche. Au lieu de suivre des instructions fixes, un algorithme de machine learning utilise des méthodes statistiques pour identifier des modèles dans les données et faire des prédictions ou des classifications. Par exemple, un algorithme peut apprendre à distinguer des photos de chats et de chiens en analysant un grand nombre d'images étiquetées.
Le Deep Learning est un sous-domaine du Machine Learning. Il est basé sur des réseaux de neurones artificiels qui s'inspirent du fonctionnement du cerveau humain. Ces réseaux sont composés de multiples couches de neurones, d'où le terme "deep" ("profond" en français). Contrairement au machine learning traditionnel qui peut nécessiter une intervention humaine pour l'extraction de certaines caractéristiques des données, le deep learning est capable d'apprendre et d'extraire automatiquement des caractéristiques complexes et abstraites directement à partir de grandes quantités de données brutes. C'est cette capacité qui rend le deep learning particulièrement efficace pour des tâches comme la reconnaissance d'images, la traduction automatique ou la reconnaissance vocale.
L'électroencéphalogramme est un outil neurophysiologique pertinent et souvent utilisé dans la recherche pour étudier le trouble obsessionnel-compulsif (TOC). Les données électrophysiologiques révèlent en effet des altérations typiques, telles qu'un ralentissement frontal et une amplification de la négativité liée à l'erreur, suggérant des dysfonctionnements des circuits fronto-striataux(3-4).
L’article de Naderi et Jahanian-Najafabadi “A systematic review of EEG-based machine learning classifications for obsessive-compulsive disorder: current status and future directions” publié dans BMC Psychiatry en 2025 propose ainsi une revue systématique des approches de machine learning basées sur l'électroencéphalographie pour la classification du trouble obsessionnel-compulsif(5).
L'idée des auteurs est d’identifier des signatures neurophysiologiques spécifiques au TOC sur le potentiel des analyses EEG couplées aux algorithmes de machine learning. Ici, l’objectif n’est plus de distinguer des chats ou des chiens mais des sujets sains et des patients présentant un TOC. Selon les approches employées, les résultats des études sont variables. Le taux de précision diagnostique oscille entre 70% et 95%, avec une tendance vers de meilleurs résultats pour les algorithmes de deep learning comparativement aux méthodes classiques de machine learning.
Malgré l’évidence de biais (des critères de sélection et de la taille de l'étude, entre autres facteurs.) pouvant altérer l’apprentissage des algorithmes, ces données ouvrent malgré tout plusieurs perspectives d'application clinique prometteuses. Le développement d'outils diagnostiques assistés par IA pourrait améliorer la précocité et la précision de certains diagnostic comme celui du TOC par exemple, particulièrement dans les formes atypiques.
1. Lucasius C, Ali M, Patel T, et al. A procedural overview of why, when and how to use machine learning for psychiatry. Nat Mental Health. 2025;3:8-18.
2. Gandal MJ, Haney JR, Wamsley B, et al. A Primer on the Use of Machine Learning to Distill Knowledge from Data in Biological Psychiatry. Biol Psychiatry. 2024;95(12):1010-1028.
3. Grützmann R, Endrass T, Kaufmann C, et al. Presupplementary motor area contributes to altered error monitoring in obsessive-compulsive disorder. Biol Psychiatry. 2016;80(7):562-571.
4. Milad MR, Rauch SL. Obsessive-compulsive disorder: beyond segregated cortico-striatal pathways. Trends Cogn Sci. 2012;16(1):43-51.
5. Naderi, M., Jahanian-Najafabadi, A. A systematic review of EEG-based machine learning classifications for obsessive-compulsive disorder: current status and future directions. BMC Psychiatry 25, 854 (2025). https://doi.org/10.1186/s12888-025-07296-z