À l'occasion de sa 21e édition, le Congrès de l'Encéphale a décerné plusieurs prix : découvrez les travaux et start-up récompensés !
Alix ROMIER (1) ; Julia MARUANI (1) ; Charlotte BOIRET (1) ; Michel LEJOYEUX (1) ; Pierre Alexis GEOFFROY (1)
(1) Santé Publique France, Saint-Maurice, FRANCE ; (2) : INSERM EPOPE, Paris, FRANCE
Objectif : confirmer les altérations du sommeil et des rythmes circadiens associés à la crise suicidaire chez les patients souffrant d’épisode dépressif caractérisé (EDC).
Méthodes : nous avons réalisé une étude cas-témoins incluant 52 patients avec un diagnostic d’EDC, divisés en deux groupes : 29 patients ayant eu des idées ou des comportements suicidaires au cours de la semaine précédente (S) et 23 patients sans idées ou comportements suicidaires (NS). Tous les participants ont complété des auto-questionnaires d'évaluation du sommeil et ont été enregistrés par actimétrie pendant 14 jours.
Résultats : les idées ou comportements suicidaires étaient associés au genre féminin (p=0.003) et à un âge plus jeune (p=0.026). On retrouvait chez les patients du groupe S, comparés à ceux du groupe NS, un décalage des rythmes veille-sommeil mesuré par actimétrie (L5 onset, p=0.028 et M10 onset, p=0.033, respectivement) et des symptômes d'hypersomnie plus sévères sur l’échelle de sévérité de l'hypersomnie (HSI, p=0.002). Après ajustement sur l'âge, le genre et la sévérité de la dépression, le début tardif des activités diurnes restait significativement associé aux idées et comportements suicidaires (M10 onset, groupe S = 11:00:00 versus groupe NS = 09:46:22, p=0.021) et à leur intensité (Spearman’s r=3.43e-5, p=0.005).
Conclusion : un décalage des rythmes veille-sommeil objectivé par actimétrie et la présence de symptômes d'hypersomnie sont des marqueurs associés à la crise suicidaire et à son intensité. Tout changement récent de ces marqueurs pourrait être considéré comme un signe d’alerte de crise suicidaire dans la dépression, et comme une cible thérapeutique.
Hélène COPPEE (1) ; Gilles BERTSCHY (1) ; Sébastien WEIBEL (1)
(1) Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, Strasbourg, FRANCE
Le trouble bipolaire est une pathologie fréquente et sévère, considérée par l'OMS comme l'une des dix pathologies les plus invalidantes, et dont la question de l'échappement thérapeutique reste un intérêt de santé publique.
Dans différentes études, la Clozapine a pu montrer un intérêt dans le traitement des troubles bipolaires pharmacorésistants. Les études restent cependant peu nombreuses, de qualité souvent faible à modérée, et l'absence de consensus sur la définition de trouble bipolaire résistant rend les populations hétérogènes, compliquant la réalisation de méta-analyse.
Nous avons conduit une étude descriptive, ainsi qu'une étude rétrospective en miroir, à 1, 3 et 5 ans, afin de déterminer le profil des patient bipolaires ayant reçu un traitement par Clozapine aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, et évaluer son efficacité comme traitement prophylaxique. Nous avons exclu les patients présentant un trouble schizo-affectif, afin de nous assurer l'évaluation de la Clozapine sur ses propriétés thymorégulatrices.
La Clozapine a été majoritairement administrée à des patients présentant un trouble bipolaire de type I, dans un contexte d'épisode maniaque pharmacorésistant (30%). La notion de pharmacorésistance est retrouvée dans 92% des cas (avec en moyenne, un échappement à 3 à 4 neuroleptiques avant introduction de la Clozapine). On retrouve des épisodes thymiques à caractéristiques psychotiques dans 61% des dossiers, et des cycles rapides dans 46% des dossiers.
Nous retrouvons une diminution significative des épisodes maniaques, hypomanes et mixtes totaux (hospitalisés + ambulatoires) (p = 0,013) à 1 an ainsi qu'une diminution significative du nombre d'épisodes totaux (p = 0,014), des hospitalisations pour épisode maniaque, mixte ou hypomane (p = 0,021), des hospitalisations en soins contraints (p = 0,048), du nombre de jour d'hospitalisation (p = 0,018), et des épisodes dépressifs ambulatoires (p = 0,048).
À 3 ans nous retrouvons une diminution significative des épisodes maniaques, hypomanes et mixtes totaux (hospitalisés + ambulatoires) (p = 0,032), du nombre d'épisodes thymiques totaux (p = 0,022) et du nombre de jours d'hospitalisation (p = 0,037). Nous ne retrouvons pas de résultat significatif à 5 ans.
La Clozapine semble donc être un traitement prometteur dans le traitement prophylactique des troubles bipolaires avec échappement thérapeutique. Les épisodes thymiques semblent en effet moins sévères, avec diminution de la récurrence d'épisodes à polarité haute et basse à 1 an, et de polarité haute à 3 ans.
Lou LEFEVRE (1) ; Émilie OLIÉ (1) ; Philippe COURTET (1)
(1) Lapeyronie, Montpellier, FRANCE
Le toucher affectif, médié par les fibres C, active des régions du "cerveau social" telles que l'amygdale, l'insula, le cortex orbitofrontal (OFC) et module l'activité du système opioïdergique. Or les études révèlent un dysfonctionnement de l'OFC chez les suicidants, qui présentent des altérations de la prise de décision. L’implication du système opioïdergique est également suggérée dans la vulnérabilité suicidaire. D’autres éléments nous amènent à penser que la vulnérabilité suicidaire pourrait être associée à une altération de la perception tactile : le toucher affectif réduit le sentiment de rejet social artificiellement induit, or l’isolement social est un facteur de risque de TS. La maltraitance infantile et l’attachement insécure sont des facteurs de risque de TS à l’âge adulte, or l’attachement insécure est associé à l'altération de la perception du toucher affectif. L'anorexie mentale ou la fibromyalgie, pathologies suicidogènes, sont associées à une perception agréable du toucher affectif diminuée. L'anhédonie, facteur de risque suicidaire, peut réduire l'agréabilité du toucher.
Hypothèse : le toucher affectif est moins hédonique chez les sujets ayant un antécédent de TS par rapport aux sujets sans de tels antécédents, en lien avec de moindres performances de prise de décision du fait de l’implication de l'OFC et d’une altération du système opioïdergique.
Méthode : Des patientes euthymiques âgées de 18 à 65 ans ayant un antécédent d’EDC sont réparties en 2 groupes en fonction de leur histoire de TS. Nous évaluons leur psychopathologie, l’histoire de maltraitance infantile, leur niveau de solitude, leur perception intéroceptive, leur relation à leur corps, leur personnalité, leur anhédonie et leur style d’attachement à l'aide d'échelles, ainsi que leur prise de décision (Iowa Gambling Task et Ultimatum Game). Nous réalisons 6 blocs de toucher affectif et non affectif dans un ordre aléatoire sur leur avant-bras gauche : après chaque bloc, la patiente évalue l’intensité et l'agréabilité de la stimulation. Un prélèvement sanguin est réalisé avant et après stimulation pour mesurer le taux de ß-endorphine et évaluer la variation de l’expression de gènes codant pour des récepteurs (OPRM1, OPRK1, OPRD1) et peptides opioïdergiques (pro-opiomélanocortine, pro-enképhaline, pro-dynomorphine) liée à la stimulation tactile.
Résultats préliminaires : 35 patientes inclues entre février et août 2022 (23 suicidantes, 12 témoins affectifs). La différence d’agréabilité perçue du toucher affectif par rapport au toucher non affectif est significativement plus faible dans le groupe suicidantes, après ajustement sur l’âge, le temps et les scores psychométriques dont la comparaison univariée entre groupes est significative (-1.45;p =0,006).
Conclusion : Les suicidantes présentent une altération de la discrimination de l’agréabilité d’un toucher affectif par rapport à un toucher non affectif en comparaison avec les patientes sans antécédent de TS.
Bouchra HALLAB (1) ; El Khansaa LAYOUSSIFI (1) ; Meriem EL YAZAJI (1)
(1) Université Hassan 2 Casablanca, Casablanca, MAROC
Introduction : La pandémie actuelle de la COVID-19 représente le plus grand traumatisme collectif depuis une génération. Beaucoup d’études ont évalué la consommation de substances psychoactives chez les sujets dépendants en tant que stratégie de coping, mais paradoxalement, peu d’études ont spécifiquement étudié leurs stratégies de coping pour faire face au stress.
Objectif et Méthodologie : Nous avons recruté 117 patients avec trouble lié à l’usage de substance (TUS) sur une période de six mois (du mois d’Avril 2020 au mois de Novembre 2020).
Après avoir détaillé les caractéristiques socio-démographiques de nos participants, nous avons évalué grâce au questionnaire AUDIT la sévérité de la consommation d’alcool, le test Fagerstrom pour mesurer celle liée de tabac et le questionnaire CAST pour mesurer celle du cannabis, puis grâce au questionnaire brief cope nous avons analysé les différentes stratégies d’adaptation et de coping utilisées par les sujets dépendants au tabac, au cannabis et à l’alcool
Résultats et discussion : Au total, 117 patients ont participé à notre questionnaire majoritairement des hommes 87,18% (N=102).
En période de pandémie à covid-19, l’isolement social, le stress important et la perte d’emploi sont associés significativement à la sévérité de la dépendance.
Nos résultats indiquent que parmi les 14 stratégies d’adaptation du brief cope, la consommation de substance (stratégie du coping évitant) est la première stratégie utilisée par nos patients pour faire face au stress de la pandémie à covid-19 (P=0,00001) toutes substances confondues.
Conclusion : L’utilisation de la consommation de substances face au stress de la pandémie à covid 19 est préoccupante. Il paraît ainsi indispensable d’adapter nos prises en charge afin d’améliorer et de diversifier les stratégies de coping de nos patients leur permettant ainsi une abstinence de longue durée.
Un nouveau format de prix a été décerné cette année : le Prix Mouchabac de la Big Five. Après avoir remporté 5 fois cette session phare du congrès, Stéphane Mouchabac a rendu son titre et a pu féliciter Denis David le gagnant de cette année qui a reçu le prix pour son choix de littérature scientifique.
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Dépression, anxiété et idées suicidaires à deux mois du post-partum : données de l'Enquête Nationale Périnatale de 2021
Sarah TEBEKA (1) ; Alexandra DONCARLI (1) ; Virginie DEMIGUEL (1) ; Camille LE RAY (2) ; Nolwenn REGNAULT (1) ; Study Group ENP 2021 STUDY GROUP (1,2)
(1) Santé Publique France, Saint-Maurice, FRANCE ; (2) : INSERM EPOPE, Paris, FRANCE
Introduction : La dépression du post-partum (DPP) est un trouble qui peut avoir des conséquences délétères tant sur la mère que sur le nouveau-né. De l’anxiété ou des idées suicidaires peuvent également s’accentuer ou apparaître après l’accouchement. À partir de données de l’Enquête Nationale Périnatale menée en 2021, nos objectifs étaient i) d’estimer la prévalence de la DPP, de l’anxiété et des idées suicidaires à deux mois post-partum chez les femmes accouchées en France en 2021, ii) de décrire la prévalence de la DPP selon les régions.
Méthodes : Notre échantillon incluait 7133 femmes majeures accouchées en France héxagonale en 2021 et ayant complété les 10 items de l’auto-questionnaire Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS) à deux mois post-partum. Les prévalences nationales de la DPP (score de l’EPDS>=13), de l’anxiété (EPDS-3A>=5) et des idées suicidaires (item 10 de l’EPDS>=1) ont été calculées. Pour la DPP et l’anxiété, des prévalences régionales ont été estimées. Les données ont été pondérées pour le traitement de la non-réponse.
Résultats : En 2021, la prévalence nationale de la DPP deux mois après l’accouchement était de 16,7% (IC95% [15,7-17,7]). L’anxiété et les idées suicidaires concernaient 27,6% ([26,5-28,8]) et 5,4% ([4,7-6,1]) des femmes répondantes respectivement. Parmi les femmes atteintes de DPP, 83,2% ([80,6-85,7]) présentaient également une symptomatologie anxieuse et 23,8% ([12,1-26,9]) des idées suicidaires. On relevait une disparité régionale importante pour la DPP comme pour l’anxiété avec une prévalence variant de : i) 11,5% en Bourgogne-France-Comté, à 21,6% en Centre-Val-de-Loire pour la DPP et ii) 22% en Normandie à 33,6% en Centre-Val-de-Loire pour l’anxiété.
Discussion : En France, en 2021, près d’une femme sur six avaient déclaré une dépression à deux mois post-partum, deux femmes sur cinq avaient un niveau d’anxiété important et un peu moins d’une femme sur 20 déclaraient des idées suicidaires. Ces résultats sont en accord avec les données internationales publiées. Ils soulignent le caractère fondamental des politiques de prévention, de repérage et de soutien des femmes en période périnatale, à travers par exemple les entretiens pré et postnataux. D’autres analyses permettront d’analyser les profils des femmes les plus à risque.