Intégration de l'expérience vécue dans la recherche en santé mentale : Commission Lancet Psychiatry
Chaque année, le congrès de l'ECNP organise et accueille une session avec des associations de patients sur un thème spécifique. La séance de cette année porte sur l’expérience vécue en neurosciences.
La pratique clinique évolue vers de nouvelles approches qui mettent en avant la capacité d’agir du patient et son expérience est de plus en plus reconnue comme une forme d’expertise. La participation de personnes ayant une « expérience vécue » à la recherche en santé mentale améliore la validité écologique, élargit la transférabilité, et optimise la recherche en augmentant l’applicabilité, en améliorant l’efficience et l’impact et en ouvrant des possibilités de financement.
L'objectif du panel d'aujourd'hui est de vous présenter cette commission qui n'en est qu'à ses débuts. Leur objectif : expliquer l'importance de l' « expérience vécue » dans la recherche en santé mentale et de l'intégrer à tous les stades du processus de recherche en santé mentale.
Dustin Graham (États-Unis) de l’équipe éditoriale, nous explique comment le Lancet Psychiatry a intégré l' « expérience vécue » au fil des ans.
Lorsque la revue Lancet psychiatrie a été lancée il y a une dizaine d'années, l' « expérience vécue » a d’emblée été une mission importante de la revue, comme en témoigne les 3 actions qui ont vu le jour :
- Depuis plusieurs années, la commission a constitué un groupe de pairs évaluateurs afin d’apporter une perspective « expérience vécue » sur les articles de recherche soumis à publication.
- La commission a modifié son guide pour les auteurs en demandant aux chercheurs, d'indiquer dans le résumé ou dans la section méthodes, si, oui ou non, l' « expérience vécue » a été prise en compte dans leur travail. Le cas échéant, ils doivent fournir plus de détails à ce sujet.
- Enfin, elle participe à un comité consultatif éditorial, sur lequel l’équipe s'appuie pour assurer un leadership solide, avec au sein de ce comité de nombreux leaders dans le domaine de la recherche sur l' « expérience vécue ».
Pour quoi faire ?
Selon Laura E. Fischer, responsable de la Commission, PDG de Traumascapes et membre du Service User REsearch Entreprise (SURE) du King’s College à Londres : « Parce que l'intégration de l'expérience vécue est essentielle pour que la science ait un sens, et ce, quelle que soit la forme de recherche en matière de santé. Parce que les connaissances tirées de l' « expérience vécue » permettent de poser les bonnes questions, de mesurer les bons éléments, de hiérarchiser les bonnes interventions et de répondre aux besoins les plus urgents.
La Commission vise à faire en sorte que les pratiques et les politiques de santé servent efficacement les personnes concernées et que les inégalités soient traitées de manière appropriée.
Si aujourd’hui, les personnes avec une « expérience vécue » remarquent que l’intégration de l'expérience vécue est de plus en plus valorisée par les personnes qui mènent, qui publient, et même qui financent les études, il existe encore de nombreuses disparités en ce qui concerne la manière dont le rôle de l' « expérience vécue » est compris et valorisé, la manière dont il est théorisé et la manière dont il est mis en œuvre en pratique.
De nombreuses questions restent sans réponse. Comment la recherche peut-elle véritablement et respectueusement intégrer l' « expérience vécue » des personnes ? Sous quelle forme peut-elle être intégrée dans les différents domaines scientifiques ? Comment éviter le « tokénisme » ? Quels changements faut-il prévoir sur le plan structurel, systémique et culturel ? Comment servir durablement l’épistémologie et la justice sociale ? Tant que ces questions ne seront pas résolues, il existera un risque que l’intégration des « expériences vécues » ne se limite à une petite partie de la recherche avec un impact limité.
C'est à cela que la Commission veut s’attaquer. Réfléchir à l'histoire et à l'évolution de l' « expérience vécue » dans la recherche en santé mentale, évaluer les connaissances et les pratiques cliniques, établir des principes clés pour l' « expérience vécue » dans la recherche en santé mentale, et fournir des recommandations pour les recherches à venir ».
Mais qui est Sullivan Holderbach : Survivor-Artist-Researcher…. ?
Sullivan est un « survivant – artiste – chercheur » pour la Commission de psychiatrie du Lancet sur l' « expérience vécue » et la recherche en santé mentale.
Survivant, parce qu’ayant vécu des traumatismes et ayant eu un parcours en santé mentale. Ainsi, son expérience doublée d’une formation complémentaire, lui permet de s’engager auprès d’autres personnes ayant une « expérience vécue », de manière sensible, sûre et responsable.
Artiste, car sa créativité l’a aidé dans son propre rétablissement. Également, parce qu’une partie de son expertise consiste à trouver les bons canaux créatifs pour donner une voix à ce qui est autrement indicible. Il saisit les nuances et la complexité et les traduit en messages clés à travers différents supports créatifs. Il souligne par ailleurs son rôle pour combler les fossés entre les chercheurs et les patients lorsqu’il s’agit de parler recherche scientifique. Pour cela, il s’appuie sur des sites Web, de l’infographie, des podcasts, etc.
Chercheur, il aime souligner l’importance de la recherche éthique et responsable comme moyen de faire progresser le discours public et de produire un impact significatif et durable. Sa mission au sein de la Commission : recueillir les voix de toutes les parties prenantes afin de veiller à ce que les bonnes voix soient entendues par les bonnes personnes de la manière la plus efficace et la plus significative possible.
Dr Odile Amiot, psychiatre, Boulogne-Billancourt
Compte rendu d'une session présentée lors de l'ECNP (European College of Neuropsychopharmacology), Milan 21-24 septembre 2024
Avec le soutien institutionnel de Lundbeck
Attention cette publication est un compte-rendu de congrès qui peut contenir des informations hors autorisation de mise sur le marché
