LE ROUX L.(1), DOGBE FOLI A.(1)
1. Institut Catholique de Toulouse, Toulouse, FRANCE
L’automutilation définit tout acte par lequel la personne blesse son propre corps dans différents contextes (De Oliveira De Paula Cidade et Abu-Jamra Zornig, 2021). Une étude, menée par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) et publiée en 2024, alerte sur l’augmentation des hospitalisations pour des gestes auto-infligés ces dernières années. Ces comportements, concernant majoritairement les adolescentes et les jeunes femmes, constituent un indicateur de souffrances psychiques et permettraient au sujet d’exprimer son mal-être (Canoville, 2016). Des travaux empiriques mentionnent plusieurs facteurs de risque : les troubles de personnalité borderline (Brown et Plener, 2017 ); des antécédents de traumatismes, des troubles émotionnels, et des dynamiques familiales dysfonctionnelles (Mungo et Delhaye, 2022). Dans la continuité des travaux qui soulignent que les agressions sexuelles sont une cause importante de comportements d’automutilation comme la scarification (Le Breton, 2015), notre intérêt porte spécifiquement sur les répercussions à l’âge adulte des agressions sexuelles subies durant l’enfance. A notre connaissance, peu de recherches examinent les liens entre les expériences sexuelles traumatisantes et le recours à des comportements d’automutilation auprès de jeunes adultes. Or, la période du jeune adulte est une phase de vulnérabilité spécifique en matière de santé mentale.
En mars 2024, nous avons interrogé 322 femmes, victimes de violences sexuelles et âgées de 18 à 25 ans (âge moyen = 21.10 ans ; E.T. = 2.27 ans). Deux questionnaires auto-rapportés ont été utilisés. Premièrement, le PCL-5 évalue le stress post-traumatique en lien avec la violence sexuelle subie (Weathers et al., 2013) à travers quatre dimensions : les symptômes anxio-dépressifs, la reviviscence, les cognitions négatives et l’évitement. Deuxièmement, l’inventaire d’automutilation - SHI (Sansone et al., 1995), évalue deux types de comportements auto agressifs (comportements centrés sur le corps d’une part et les conduites à risque d’autre part).
On note une prévalence élevée de comportements d'automutilation multiples chez les participantes (cf. images 1 et 2). Les analyses de régression révèlent que les symptômes anxio-dépressifs, en tant que dimension du traumatisme sexuel, constituent le principal prédicteur de ces comportements. Plus les symptômes anxio-dépressifs sont prononcés, plus les comportements d’automutilation centrée sur le corps (coupure, brûlure, etc.) et les conduites à risque (overdose, tentatives de suicide, etc.) sont fréquents.
Cette étude souligne l'importance des symptômes anxio-dépressifs comme facteur de risque prédominant dans le développement et le maintien des comportements d'automutilation chez les victimes de traumatismes sexuels.