Olivier Véran, Ministre de la Santé, a mis en garde contre une troisième vague qui serait psychiatrique. En effet, d’après l’étude de Santé Publique France (1) et le rapport Épi-phare (2), les taux d’anxiété et de dépression ont doublé, la consommation de psychotropes et l’incidence des idées suicidaires sont en forte hausse, y compris chez les Français sans antécédent psychiatrique. Même lorsqu’il ne s’agit pas de troubles psychiatriques à proprement parler, la santé mentale a été fragilisée (3).
Comment faire la part des effets de l’épidémie et des effets des mesures sanitaires dans l’émergence de ces troubles psychiques ? D’un côté, la COVID-19 touche directement l’intégrité des individus : elle tue, et peut traumatiser ceux qui y réchappent ou perdent un proche. Le climat d’incertitude majeure dans lequel les Français ont été plongés est ainsi pourvoyeur d’angoisse.
De l’autre, cette incertitude est aussi le fait de la crise économique et sociale à venir. À cette incertitude s’ajoutent les mesures sanitaires de distanciation physique préconisées pour se protéger et protéger les autres. Conséquences : isolement parfois majeur de ceux dont la vie sociale se passait au-dehors, précarisation de ceux qui n’ont pu travailler, tensions au sein des familles.
Les neurosciences nous ont appris que l’isolement social est à l’origine d’une douleur mentale (4) et que celle-ci est au cœur des idées suicidaires (5). L’interdiction des visites en EHPAD et la limitation du nombre de personnes aux obsèques pendant le premier confinement ont impacté les liens avec nos aînés et les processus de deuil.
Les conséquences de ces ruptures symboliques sont encore à comprendre. De même, le couvre-feu a pu être perçu comme un message de primauté du travail sur le lien social, le loisir ou la culture, sources de bien-être et d’équilibre. Or, comme le rappelle l’OMS, la santé est « un état de complet bien-être physique, mental et social [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». La santé ne saurait être préservée sans tenir compte du bien-être mental.
Lucie Berkovitch
Cheffe de clinique au GHU Psychiatrie et Neurosciences
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