Psychiatrie clinique, biologique et thérapeutique

L'Encéphale – Volume 42, fascicule 4

Publié le mercredi 7 septembre 2016

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août 2016

Divers

Editorial board

Éditorial

Is negative hallucination still a viable concept?

Auteurs : R. Jardri

Articles de recherche

Divergences dans l’expertise de responsabilité des personnes schizophrènes accusées d’homicide volontaire : enquête auprès des experts de...

Auteurs : J. Guivarch, M.-D. Piercecchi-Marti, D. Glezer, J.-M. Chabannes

RésuméL’expertise psychiatrique pénale semble aujourd’hui en France connaître un malaise, avec des critiques de plus en plus nombreuses, portant plus particulièrement sur l’existence de divergences entre les experts. Notre objectif était de rechercher les points de divergences entre les experts, d’essayer d’en comprendre l’origine et de proposer des pistes pour essayer de les réduire. Pour cela, nous avons réalisé une enquête auprès des experts psychiatres de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, à l’aide d’entretiens semi-directifs, portant sur un cadre restreint, l’expertise psychiatrique pré-sententielle des personnes schizophrènes accusées d’homicide volontaire. Nous avons mis en évidence d’importantes divergences entre les experts concernant la question de la responsabilité pénale des personnes schizophrènes – pour laquelle les professionnels semblaient plutôt retenir l’alternative entre abolition et altération du discernement –, plus particulièrement dans des contextes plus spécifiques, comme l’arrêt du traitement ou la prise de toxiques au moment des faits. Les désaccords étaient liés à des écoles de pensée différentes ou à des conceptions personnelles qui pouvaient fausser l’évaluation clinique et surtout l’interprétation médicolégale du lien entre la pathologie et les faits. Nous avons dégagé cinq perspectives pour réduire les divergences.

Suicide dans la Police nationale française : trajectoires de vie et facteurs associés

Auteurs : G. Encrenaz, A. Miras, B. Contrand, M. Séguin, M. Moulki, R. Queinec, J.-S. René, A. Fériot, M. Mougin, M. Bonfils, P. Marien, G. Michel, E. Lagarde

RésuméLes taux de suicide sont généralement plus élevés dans les forces de l’ordre qu’au sein d’autres professions. Pour en comprendre les raisons, les objectifs de cette étude réalisée à partir d’un échantillon de policiers décédés par suicide étaient : (1) de déterminer les facteurs impliqués dans le passage à l’acte suicidaire ; (2) de décrire leur trajectoire de vie. Des autopsies psychologiques ont été conduites autour des 49 situations de suicide de policiers survenues en 2008. Le supérieur hiérarchique, un collègue de travail et un proche ont été interrogés par des psychologues formés, en utilisant des outils standardisés. Chaque dossier a ensuite été évalué par un panel d’experts. L’analyse a montré que tous les policiers ayant mis fin à leurs jours présentaient les symptômes d’un trouble mental, le plus souvent de type dépressif. Après les difficultés d’ordre psychologique, les principaux facteurs de vulnérabilité concernaient la sphère affective. La sphère professionnelle était source de vulnérabilité dans une moindre mesure, mais était également source de protection. Quatre types de trajectoires de vie impliquées dans la suicidalité ont été mis en évidence. L’ensemble de ces résultats confirme que la prévention ne peut reposer que sur le dépistage de la souffrance psychologique et sa prise en charge, qui doit inclure une approche globale, en tenant compte de l’ensemble des sources de vulnérabilités.

L’impulsivité : quelles conséquences sur l’adhésion aux soins ? Présentation d’une étude réalisée en addictologie

Auteurs : A. Cancel, F. Naudet, P.F. Rousseau, B. Millet, D. Drapier

RésuméL’impulsivité est une dimension transnosographique fréquemment retrouvée en psychiatrie et ses conséquences sur les soins sont majeures. Il a donc été réalisé une étude originale de cohorte, prospective, observationnelle et analytique sur les conséquences de l’impulsivité sur l’adhésion aux soins dans trois services d’hospitalisation spécialisés en addictologie. La population étudiée comprenait 85 patients âgés de 18 à 70ans, hospitalisés à l’établissement public de santé mentale du Morbihan pour une ou plusieurs addictions. L’impulsivité a été évaluée à l’aide de la BIS-11 en début de prise en charge pour tous les patients inclus. La mesure de l’adhésion thérapeutique réalisée à l’issue de la cure a nécessité la création d’une échelle d’évaluation composée de l’évaluation numérique simple par les équipes soignantes, les psychiatres et le rapport entre durée de soins réalisée et prévue. Le résultat principal de l’étude révèle une corrélation négative significative entre la dimension motrice de l’impulsivité et l’adhésion aux soins (r=−0,37 et p=0,001). Les autres dimensions de l’impulsivité ont également été évaluées, sans résultat significatif, de même que les différentes modalités d’hospitalisation (libre ou sous contrainte, programmée ou non, etc.), qui n’ont pas prouvé avoir de conséquences sur l’adhésion thérapeutique. Ces résultats originaux permettent de s’interroger sur l’adaptation des soins en addictologie aux patients impulsifs sur le plan moteur, vers des cures plus courtes et plus efficaces sur le plan de la santé publique.

Validation de la version française du « Beliefs About Voices Questionnaire–Revised » (BAVQ-R)

Auteurs : A. Zanello, M. Badan Bâ

RésuméLe modèle cognitif du maintien des hallucinations verbales accorde une importance centrale aux croyances du patient les concernant. Le BAVQ-R explore ces croyances et les réactions aux voix. Cette étude examine les propriétés psychométriques de la version française de cet instrument. Soixante-seize entendeurs de voix ont complété le BAVQ-R ainsi que des mesures de symptômes, d’estime de soi et de qualité de vie. Le BAVQ-R a été rempli à trois reprises : ligne de base, après 6 semaines et après une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) de groupe. Les résultats montrent que sa consistance interne varie de questionnable à bonne, que sa stabilité temporelle est satisfaisante, sauf pour l’omnipotence, et que sa fidélité de construit est cohérente avec le modèle cognitif. Sa validité convergente montre des corrélations robustes entre malveillance, omnipotence, résistance d’un côté et la symptomatologie anxio-dépressive et l’estime de soi négative de l’autre. En revanche, sa sensibilité au changement n’a pas été observée après la thérapie de groupe. De plus, sa validité discriminante paraît insuffisante. En résumé, le BAVQ-R français possède certaines qualités psychométriques satisfaisantes mais présente encore des lacunes qui mériteraient d’être corrigées dans de futures études.

Validation française de l’échelle de frustration et d’inconfort (Frustration Discomfort Scale)

Auteurs : J.-L. Chamayou, V. Tsenova, C. Gonthier, C. Blatier, A. Yahyaoui

RésuméLe concept d’intolérance à la frustration est considéré comme un facteur important des troubles psycho-affectifs. L’échelle d’intolérance à la frustration et à l’inconfort (FDS) d’Harrington (2005) a été développée pour évaluer ce phénomène. Notre objectif consistait à évaluer les propriétés psychométriques de l’échelle d’intolérance à la frustration et à l’inconfort auprès d’une population française. L’échelle a été traduite en français et soumise à 289 étudiants de l’université de Savoie, en conjonction avec un questionnaire de régulation émotionnelle et une échelle de stress perçu. Les résultats indiquent que l’échelle traduite présente de bonnes qualités psychométriques et apparaît significativement liée à la mesure du stress ainsi qu’aux stratégies de régulation émotionnelle non adaptatives. En revanche, la structure factorielle à quatre dimensions de l’échelle n’est que partiellement soutenue par les données, qui suggèrent plutôt l’existence d’un facteur général unique.

Image corporelle et grossesse : examen des propriétés psychométriques de la traduction française de la Pregnancy and Weight Gain Attitude Scale...

Auteurs : A. Rousseau, A. Bouillon, L. Lefebvre, N. Séjourné, A. Denis

RésuméLes préoccupations corporelles des femmes enceintes peuvent favoriser l’adoption de comportements visant à contrôler la prise de poids et augmenter la vulnérabilité aux troubles du comportement alimentaire. L’objectif de la présente étude est d’étudier les propriétés psychométriques de la Pregnancy and Weight Gain Attitude Scale qui permet d’évaluer les attitudes par rapport à la prise de poids occasionnée par la grossesse. L’échantillon est composé de 553 femmes (29,32±4,82ans) en cours de troisième trimestre de grossesse. Chaque femme a complété la Pregnancy and Weight Gain Attitude Scale (PWGAS) ainsi qu’un questionnaire évaluant l’insatisfaction corporelle (Body Shape Questionnaire). La PWGAS, dans sa version initiale, comprend 18 items et se compose de quatre sous-échelles. Une analyse factorielle confirmatoire de la version originale a mis en évidence des indices d’ajustement en dessous des seuils recommandés. Une analyse factorielle exploratoire a permis de dégager cinq facteurs qui expliquent 55 % de la variance. Ces cinq facteurs ainsi que le score total du PWGAS sont corrélés négativement avec le Body Shape Questionnaire témoignant ainsi de la bonne validité concourante du PWGAS. Une analyse factorielle confirmatoire se prononce en faveur de la version française observée en cinq facteurs.

Revue de la littérature

Catatonic syndrome: From detection to therapy

Auteurs : J. Madigand, P. Lebain, G. Callery, S. Dollfus

AbstractIntroductionCatatonia is a psychomotor syndrome which can include motor, mental, behavioral and vegetative symptoms. Exclusively associated with schizophrenia until the 1970s, catatonia still remains an under-diagnosed syndrome with significant morbidity and mortality.Literature findingsAs a result of its different forms and developments, catatonic syndrome can be associated with many organic and psychiatric etiologies and confused with a variety of diagnoses. In addition to its organic complications, malignant catatonia can also be extremely severe. Several diagnostic scales are described, those of Bush and Peralta being the most widely used. Despite the recent development of the DSM-5, we can regret the lack of progress in the international classifications concerning both the recognition of the etiological diversity of this syndrome and in the clinical and therapeutic approaches to it. The diagnosis is based solely on clinical data, and needs to be completed by information from paraclinical settings, particularly with respect to detecting organic etiology. The first-line treatment is still based on the use of certain benzodiazepines or benzodiazepine-like agents such as lorazepam, diazepam and zolpidem. If the first or second line fails, or in case of malignant catatonia, electroconvulsive therapy is recommended. For the periodic form, no large-sample study has been performed on long-term treatment. A few case reports suggest the use of lithium in periodic catatonia, specifically to prevent recurrent episodes or at least to extend the inter-episode intervals. Other studies are in favor of the use of benzodiazepines, with disagreement between gradual discontinuation and long-term treatment. Concerning the management of catatonia in patients with schizophrenia, for whom first-line benzodiazepines are often insufficient, certain atypical antipsychotics such as clozapine or quetiapine appear efficient. These data are also applicable to children and adolescents.ConclusionOften neglected by practitioners, catatonic syndrome remains a common entity of which it is important to be aware, especially in case of rapid installation of the symptoms. Diagnostic scales should be used and a lorazepam test should be performed to avoid delaying the diagnosis. Second-line therapy requires further study. This concerns in particular diazepam, anti-NMDA (N-methyl-D-aspartate) and rTMS (repetitive transcranial magnetic stimulation). Some specificities of catatonia, such as the periodic form and cases in patients with schizophrenia, also require further evaluations.RésuméIntroductionLa catatonie est un syndrome psychomoteur qui comprend des symptômes moteurs, mentaux, comportementaux et neurovégétatifs. Exclusivement rattaché à la schizophrénie jusque dans les années 1970, ce syndrome reste sous-diagnostiqué malgré une morbi-mortalité relativement importante.Revue de la littératurePouvant présenter différentes formes et évolutions, le syndrome catatonique s’associe à de multiples étiologies organiques ou psychiatriques et possède plusieurs diagnostics différentiels. En dehors de ses complications organiques, la catatonie maligne peut mettre en jeu le pronostic vital. Parmi de multiples échelles, celles de Bush et de Peralta sont les plus utilisées. Malgré les récentes évolutions du DSM-5, les classifications internationales ne décrivent encore que partiellement la diversité étiologique et les approches cliniques et thérapeutiques qu’elle revêt. Le diagnostic est exclusivement clinique mais peut être complété paracliniquement pour un étayage étiologique. Le traitement de première intention comprend quelques benzodiazépines ou agents apparentés qui sont le lorazepam, le zolpidem et le diazépam. En cas de forme maligne ou d’échec des traitements médicamenteux, l’électroconvulsivothérapie est recommandée. Pour la forme périodique, aucune étude à grande échelle n’étaye la prise en charge au long cours. Quelques études de cas suggèrent pour cette forme l’emploi du lithium pour prévenir un épisode ultérieur ou tout au moins pour élargir les intervalles de temps inter-épisodiques. D’autres études de cas suggèrent plutôt l’emploi de benzodiazépines au long cours tandis que d’autres rapportent l’intérêt d’une suspension progressive. Dans le cas du syndrome catatonique chez les patients atteints de schizophrénie, seuls quelques antipsychotiques atypiques comme la quétiapine et la clozapine semblent montrer une réelle efficacité. L’ensemble de ces données seraient applicables chez l’enfant et l’adolescent.ConclusionSouvent négligé par le praticien, le syndrome catatonique reste une entité importante à connaître, en particulier lors d’une installation symptomatologique rapide. Au moindre doute, une échelle diagnostique peut être utilisée et un test au lorazepam réalisé. L’étude des autres traitements pharmacologiques devrait être approfondie et concerne le diazépam et les antagonistes des récepteurs au NMDA (N-methyl-D-aspartate). L’usage de la r-TMS (stimulation magnétique transcrânienne répétée) devrait lui aussi être davantage évalué. Il en est de même pour les spécificités des formes périodiques et de la catatonie chez les patients atteints de schizophrénie.

Réintroduction de la clozapine après neutropénie dans la schizophrénie résistante : revue des données de la littérature

Auteurs : L. Simon, F. Cazard

RésuméIntroductionLa clozapine est indiquée dans la schizophrénie résistante. La survenue d’une neutropénie constitue un effet indésirable rare de ce traitement, qui dans les recommandations internationales, justifie son arrêt et sa contre-indication ultérieure en raison de sa gravité. Néanmoins, devant l’inefficacité des antipsychotiques introduits après l’arrêt de la clozapine, la question de sa réintroduction se pose malgré la survenue d’une neutropénie.MéthodeCet article est une revue de la littérature concernant les protocoles mis en place lors de la réintroduction de la clozapine après neutropénie chez des patients schizophrènes résistants.RésultatsCes dernières années, sous couvert d’une surveillance accrue ou de molécules permettant d’augmenter le taux de polynucléaires neutrophiles circulants, la clozapine a pu être réintroduite durablement sans nouvelle complication. Les réintroductions rapportées dans la littérature sont de trois sortes : réintroduction simple, réintroduction avec association de lithium et/ou avec association de Granulocyte - colony stimulating factor (G-CSF).DiscussionLes publications retrouvées, bien que d’un faible niveau de preuve, tendent à montrer qu’une réintroduction encadrée de précautions suffisantes peut se dérouler sans récidive de neutropénie et permettre une amélioration clinique du patient. Le choix de réintroduire cette molécule doit s’effectuer après une analyse bénéfice–risque scrupuleuse pratiquée au cas par cas. Il doit tenir compte en particulier des potentiels effets secondaires inhérents au lithium et au G-CSF et, de ce fait, conduire à privilégier autant que possible une réintroduction simple assortie d’une surveillance soigneuse.ConclusionDans l’ensemble, la réintroduction de la clozapine après neutropénie chez des patients schizophrènes résistants est une alternative à considérer au cas par cas après échec des autres stratégies thérapeutiques. Les données existantes demanderaient à être confrontées à la réalisation d’études comparatives.

Usage de cathinones à Paris

Auteurs : A. Batisse, M. Grégoire, M. Marillier, M. Fortias, S. Djezzar

RésuméL’apparition au cours des dix dernières années des « nouvelles substances psychoactives » appelées également « NPS » modifie pour la première fois, de façon profonde, le monde des drogues qui passe d’une dizaine de produits à près d’une centaine. La veille sanitaire représente un outil de surveillance de ce phénomène : une augmentation de l’utilisation des cathinones de synthèse (méphédrone, NRG3, 4-MEC…) a été observée et pose de nouveaux défis aux cliniciens. Le CEIP de Paris et le centre Marmottan ont voulu dresser un tableau de la consommation de cathinones en Île-de-France et alerter la communauté des services de santé concernant les problèmes liés à l’identification des abus et les risques associés. Nous présentons la relation entre sexe et drogues en raison de l’effet spécifique que les cathinones pourraient avoir sur les pratiques sexuelles. Le point marquant est l’apparition d’une pratique de consommation de stimulants par voie intraveineuse appelée « slam » au sein des hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH). Le « slam » comprend trois caractéristiques : injections, dans un contexte sexuel et usage de drogues psychostimulantes. Le risque sanitaire s’inscrit à la fois dans le syndrome de dépendance/abus, impliquant un « craving » important, des symptômes psychiatriques prolongés, et dans le risque infectieux (VIH, VHB, VHC…). Il semble important de moins dissocier les réseaux sexuels, des réseaux d’addiction pour la réduction du risque.

Durée de psychose non traitée : état des lieux et analyse critique

Auteurs : L. Souaiby, R. Gaillard, M.-O. Krebs

RésuméLa schizophrénie est une maladie chronique dont le pronostic n’a que peu évolué durant les dernières années. La durée de psychose non traitée (DPNT) fait partie des variables les plus étudiées actuellement dans les premiers épisodes psychotiques, ce dans le but de déterminer l’effet d’une intervention précoce sur le pronostic de la schizophrénie. La DPNT définit la durée entre le début de la phase psychotique et l’initiation du traitement. Celle-ci peut être plus ou moins longue en fonction de plusieurs facteurs. Les méthodes d’évaluation de la DPNT sont multiples et leur fiabilité reste difficile à déterminer. Jusqu’à présent, aucune méthode d’évaluation de la DPNT (entretien clinique compris) n’a prouvé sa supériorité par rapport aux autres méthodes. Quel que soit l’outil d’évaluation employé, dans la schizophrénie, une DPNT plus longue est associée à un plus mauvais pronostic, à court et à long termes et ce dans plusieurs domaines. Le concept de « durée de maladie non traitée » (DMNT), période associant la phase prodromique et la DPNT, a émergé. Certaines interventions auprès de sujets « à ultra-haut-risque » de transition psychotique (c’est-à-dire durant la période « prodromique ») suggèrent des pistes prometteuses pour réduire le risque de transition, diminuer la sévérité de la maladie et plus généralement améliorer le fonctionnement des individus. La poursuite des efforts déployés dans ce domaine est nécessaire afin de comprendre la physiopathologie de la maladie et d’améliorer son pronostic.

Stress et transition psychotique : revue de la littérature

Auteurs : B. Chaumette, O. Kebir, C. Mam Lam Fook, J. Bourgin, B.P. Godsil, R. Gaillard, T.M. Jay, M.-O. Krebs

RésuméLe stress psychologique induit une dérégulation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS) qui entraîne une perturbation de la physiologie cérébrale. Ces éléments biologiques ont conduit à promouvoir l’hypothèse selon laquelle le stress pourrait influencer l’émergence de pathologies psychiatriques et en particulier l’émergence de la schizophrénie (transition psychotique). Cette revue de la littérature vise à réaliser un état des lieux de la question du stress dans la psychose et des méthodes d’investigation notamment le dosage du cortisol. Le rôle de la dérégulation de l’axe HHS dans le déclenchement de la schizophrénie est discuté. Cette dérégulation pourrait être une cause spécifique de l’entrée dans la maladie ou refléter uniquement la détresse psychologique liée à l’émergence des symptômes. La revue s’est attachée à mettre en relief les études sur l’implication du stress à différentes phases de la maladie psychotique. La littérature met en évidence une dérégulation de l’axe HHS dans la schizophrénie suivant le modèle vulnérabilité–stress. Cette dérégulation, présente dès la phase prodromique (sujets à ultra-haut risque) et dès le premier épisode psychotique, pourrait favoriser le déclenchement de la pathologie. En effet, la dérégulation de l’axe HHS et donc de la réponse au stress semble associée à l’émergence de symptômes psychotiques. Toutefois, les mécanismes précis de l’implication du stress dans le déclenchement de la maladie sont encore mal connus et nécessitent de plus amples investigations, d’autant que de nombreux facteurs confondants modulent le taux de cortisol et la réponse au stress, y compris la consommation de cannabis ou la prise de traitements. En outre, la réactivité au stress semble être modulée par des facteurs génétiques. La découverte de facteurs biologiques associés à la transition psychotique pourrait apporter une aide diagnostique et pronostique ainsi que des cibles thérapeutiques.

Qualité de vie et schizophrénie : quel instrument pour quelle qualité de vie ?

Auteurs : P.-M. Llorca, P. Gorwood

RésuméLe concept de qualité de vie est ancien, mais a été utilisé de manière extensive depuis les années 1990, avec une explosion du nombre d’instruments permettant une telle mesure, laissant les cliniciens souvent dubitatifs face à ces nombreux instruments qui ont des modalités de cotation, des finalités, des aspects dimensionnels et des temps de passation très variables. Le but de cette revue est de décrire les échelles de qualité de vie les plus utilisées dans la littérature sur la schizophrénie, et de reprendre les différentes caractéristiques et spécificités afin d’aider les cliniciens à choisir l’instrument le plus approprié en fonction de ses attentes et/ou des possibilités. De manière générale ces instruments requièrent entre 3 et 60min de passation, se basent sur un nombre d’items qui varie de 5 à 146, qui permettent de mesurer entre 1 et 14 dimensions différentes. Les deux extrêmes pourraient être l’EuroQOL qui se contente de 5 questions avec une évaluation analogique visuelle pour leur sévérité, à la Quality of Life Scale qui requiert une formation initiale et un entretien semi-structuré pour balayer les 21 axes de cotation.

Perspectives / Opinions

Réflexion sur la péréquation financière de psychiatrie en France

Auteurs : L. Boyer, G. Fond, B. Devictor, J.-C. Samuelian, C. Lancon, F. Rouillon, R. Gaillard, X. Zendjidjian, P.-M. Llorca

RésuméDepuis 25ans, des travaux sont en cours en France pour la mise en œuvre d’une alternative au mode de financement de la psychiatrie publique qui repose encore à ce jour sur des dotations annuelles de financement (DAF). En l’absence d’avancement sur les travaux relatifs au financement de la psychiatrie, certaines agences régionales de santé se sont engagées dans des travaux relatifs à la réallocation des DAF entre établissements de psychiatrie (péréquation financière). Nous proposons ici une réflexion avec des suggestions d’évolution sur la méthode proposée par l’Agence régionale de santé Provence Alpes Côte d’Azur. Sans remettre en cause la nécessité d’une réallocation de moyens entre les établissements psychiatriques, la méthode de péréquation proposée ici doit encore évoluer pour être appliquée de façon légitime et pertinente. Il existe une forme d’urgence à réaliser une péréquation financière des moyens de la psychiatrie en France, nul ne le conteste. Notre propos n’est pas d’imposer des détours théoriques et pratiques qui seraient autant de mesures dilatoires face à cette urgence, il appelle une réflexion collective et surtout la définition de modalités d’évaluation des modèles retenus et de jalons au cours du temps pour cette évaluation. C’est à ces conditions que nous pourrons garantir la qualité de la psychiatrie française et l’équité dans l’accès aux soins psychiatriques.

Lettre à la rédaction

Symptômes maniaques induits par de fortes doses de baclofène : à propos d’un cas

Auteurs : F. Rivollier, M. Masson

Commentary

Does baclofen have antidepressant qualities?

Auteurs : P.A. Geoffroy, B. Rolland

Cas clinique / Revue brève

Psychose puerpérale chez l’homme : une entité diagnostique ?

Auteurs : M. Colombel, C. Rebillard, C. Nathou, S. Dollfus

RésuméIntroductionLa psychose puerpérale (PP) est une urgence psychiatrique touchant une grossesse sur 1000. Connue depuis l’antiquité, elle a été de nombreuses fois décrite chez les mères mais peu d’études ont recherché un trouble apparenté chez les pères. La particularité de cette pathologie réside plus dans son contexte d’apparition que dans sa description sémiologique, ce qui fait que sa place nosographique est toujours discutée. L’objectif est de réfléchir à la définition de la PP pour ensuite étendre cette pathologie à l’homme.Rapport de casNous rapportons le cas d’un jeune homme de 18ans, atteint d’une bouffée délirante aiguë centrée sur la naissance de son premier enfant. Au troisième trimestre de grossesse de sa compagne, suite à un fléchissement thymique rapide, un délire riche se met en place. Il présente une négation de la grossesse puis de la naissance, accompagnée d’hallucinations acoustico-verbales et cénesthésiques à type de mouvements intra-abdominaux. Le patient devient asymptomatique après un mois de traitement par un antipsychotique atypique, la rispéridone.ConclusionLe trouble de ce patient correspond aux descriptions classiques de la psychose puerpérale. Deux éléments rendent la PP différente des autres psychoses aiguës : le contexte de grossesse et le délire centré sur l’enfant. Ce dernier peut mener à l’infanticide, or l’absence d’un cadre définissant précisément la PP n’améliore pas sa prévention et peut conduire à une prise en charge plus judiciaire que médicale des malades. Les hommes atteints de psychose aiguë dans un contexte de grossesse sont soumis aux mêmes risques. Il est nécessaire de publier de nouvelles descriptions de la PP pour redéfinir la maladie et peut-être à terme y inclure les hommes.

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